Les origines du service

Le premier daguerréotype du Soleil date de 1839.
La première photographie solaire partielle a été prise par M. Majocchi à Milan, lors de l’éclipse du 8 juillet 1842.
C’est à Fizeau et Foucault que l’on doit la première photographie complète du Soleil, le 2 avril 1845.

A partir de 1858, on obtient journellement, à Kew, des photos de 0,10 m de diamètre, grâce à John Herschell et M. Warren de la Rue.
Les protubérances sont surveillées quotidiennement dès 1868, à l’aide d’un intrument créé par Janssen et Lockyer.

En 1869, Jules Janssen énonce le principe du spectrohélioscope en décrivant une méthode pour obtenir des images monochromatiques des corps lumineux. Il imagine de placer au foyer d’un spectrographe, une fente sélectrice parallèle à la fente d’entrée. Cette fente sélectionne une région étroite du spectre (donc monochromatique). On forme sur la fente d’entrée l’image d’un corps lumineux (une flamme par exemple) et on fait tourner le spectrographe autour d’un axe passant par les deux fentes, « alors les diverses parties de l’image lumineuse viendront successivement produire leur ligne monochromatique dans la lunette d’exploration et, si le mouvement rotatif est assez rapide, la succession de toutes ces lignes produira une impression totale qui sera l’image de la flamme formée avec les rayons d’une seule réfrangibilité ».

Le bâtiment dit du Grand Sidérostat abrite les instruments solaires

Le spectrohéliographe

En 1876, Jules Janssen organise à son arrivée à Meudon, le service d’observation photographique systématique de la photosphère, visible avec une simple lunette. 20 années d’observations photographiques permettent à Janssen de commencer les recherches sur la photosphère. Il découvre au voisinage de la bande G devenue universellement utilisée aujourd’hui (appelée raie G à l’époque) des images très contrastées. La chromosphère, couche extérieure du Soleil, est observée lors des éclipses totales jusqu’en 1892, année durant laquelle Janssen met au point un procédé spectroscopique permettant l’observation des protubérances hors éclipse.

Jules JANSSEN

En février 1892, Henri Deslandres à l’observatoire de Paris, et Georges E. Hale, directeur de l’observatoire de Kenwood à Chicago, mettent en évidence la présence dans le spectre des facules solaires, de raies brillantes, identifiables avec les raies H et K attribuées au calcium. Reprenant l’idée de Janssen, on munit un spectrographe d’une fente spectrale "sélectrice". Placée devant une raie du spectre solaire, cette fente occulte le reste de la lumière émanant de l’astre. L’image du Soleil est alors balayée par l’instrument et son image, monochromatique, est reconstituée par la lumière qui traverse la fente de sortie du spectrographe : le spectrohéliographe est né.

Henri DESLANDRES

C’est en 1892 que Hale obtient les premières images spectrohéliographiques, dans la raie K du calcium II, dévoilant la chromosphère du Soleil. Deslandres divise les raies H et K utilisées pour l’observation en trois composantes : K1, K2 et K3, correspondant respectivement aux trois couches superposées, la couche renversante, la chromosphère et la chromosphère supérieure.

Parallèlement, en France, Deslandres met en place deux spectrographes automatiques enregistreurs :

  • le spectrographe des formes qui image la chromosphère avec ses plages brillantes et, avec une pose plus longue, donne également les protubérances. C’est le spectrohéliographe.
  • le spectrographe des vitesses qui, avec une fente sélectrice plus large, permet de voir la raie en entier et donc ses variations en présence de phénomènes solaires dynamiques. C’est le spectro-enregistreur.
Spectrohéliographe transformé en spectrohélioscope

En 1898, Deslandres installe à Meudon un spectrohéliographe recevant le faisceau solaire d’un sidérostat polaire. L’objectif de l’instrument a un diamètre de 20 cm pour une focale 3,2 m et fournit des images de 92 mm de diamètre.
En 1906, Deslandres est nommé directeur-adjoint de Meudon. Il oriente les ressources de l’observatoire vers les recherches solaires en édifiant notamment un grand sidérostat de Foucault à grand miroir de 1 m afin d’obtenir des spectrohéliogrammes K3. Il fait également installer un coélostat à deux miroirs de 50 et 30 cm, un enregistreur de vitesses radiales et un spectrographe enregistreur destiné à l’étude de la rotation solaire et du spectre des taches et un second coélostat à deux miroirs de 40 cm.

Spectrohéliographe quadruple de 15m

En 1908, Hale obtient au Mont Wilson des images monochromatiques dans la raie rouge Halpha et une bande passante de 0.9 A. On peut y voir des taches entourées de petites structures nommées « solar vortices », manifestation optique d’un champ magnétique.

En juillet 1908, Deslandres et d’Azambuja obtiennent un K3 qui montre clairement ce que Deslandres nomme des filaments, ce qu’il suppose être la marque des protubérances sur le disque, ou tout au moins une partie de ces protubérances. Ils commencent à observer systématiquement le Soleil afin d’étudier l’évolution de ces structures. C’est le point de départ des observations systématiques sur le site de Meudon.

En 1920, L. D’Azambuja crée le service d’observations systématiques à proprement parler. Les observations sont obtenues alors sur des plaques de verre. En 1989 a été mis en service un nouveau spectrohéliographe sur film photographique et depuis 2002, les observations sont entièrement numériques.

L’année 2018 marque 110 ans d’observations, soit 10 cycles d’activité complets du Soleil. A cette occasion, le spectrohéliographe fait l’objet d’une jouvence décennale qui le dote de nouvelles fonctionnalités, et notamment de la capacité de sonder l’ensemble des raies observées et donc de produire des spectrohéliogrammes simultanés au centre et à de multiples points des raies Hα et CaII K/H.

Grâce au service des observations systématiques, l’Observatoire de Paris dispose d’une collection unique de plus de 100000 clichés d’images monochromatiques de la chromosphère solaire au long de 10 cycles d’activité, ce qui permet de constituer la collection d’observations solaires la plus complète au monde.

Le cœlostat du spectrohéliographe hier et aujourd’hui